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The right man in the right place  at the right time

The right man in the right place at the right time

Publié le : 01/04/2021 01 avril avr. 04 2021

Avec deux arrêts publiés le même jour (Civ. 2ème, 10 décembre 2020, n°18-15.383 & n°19-22.609), la 2ème Chambre civile livre quatre enseignements majeurs sur le modus operandi des moyens de procédure. Quel moyen et dans quel ordre, à quel endroit et à quel moment, l’avocat doit tout maîtriser et tout anticiper.
Dans le premier arrêt, la Cour de cassation juge qu’à peine d’irrecevabilité, l’incident de péremption d’instance, même invoqué avant tout autre moyen en première instance, doit être à nouveau soulevé in limine devant la Cour d’appel. Et même s’il a été soutenu dans les premières conclusions pour n’apparaître que dans un deuxième temps dans le dispositif, le moyen est tout de même irrecevable.
Dans le second arrêt, la Haute cour estime qu’à peine d’irrecevabilité toujours, le magistrat de la mise en état doit être saisi de l’exception de procédure par des conclusions distinctes quand bien même le moyen aurait été conclu in limine litis dans des conclusions au fond. De surcroît, avant que l’intimé ne s’empare de la tardiveté de l’appel, l’appelant qui entend soulever l’exception de nullité de forme de la signification du jugement doit saisir à cette fin le Conseiller de la mise en état avant de conclure au fond.
La clé du succès nécessite d’agir avec ordre. A tout seigneur tout honneur : puisque l’article 388 du Code de procédure civile dispose que « La péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen », il faut toujours soulever cet incident de procédure avant toute exception de procédure, laquelle doit être invoquée, « seulement » pourrait-on dire, avant toute défense au fond et fin de non-recevoir, lesquelles peuvent être soutenues en tout état de cause. L’erreur dans l’ordre des moyens ne pardonne pas, c’est l’irrecevabilité qui est encourue.
Mais même si le moyen de péremption a été présenté in limine devant le premier juge, cet incident (ou l’exception de procédure) doit être repris de la même manière dans le dispositif des premières conclusions notifiées devant la Cour d’appel. Avec l’appel débute une nouvelle instance. L’incident de péremption déjà soulevé ne joue pas pour l’avenir : il doit être présenté à nouveau avant tout autre moyen, et non, comme en l’espèce, avant une fin de non-recevoir, quand bien même l’avocat l’estimerait plus pertinente.

Mais il ne suffit pas de détenir les clés, il faut encore frapper à la bonne porte ! L’exception de procédure (comme l’incident de nature à mettre fin à l’instance) ressort de la seule compétence du Juge ou du Conseiller de la mise en état à l’exclusion de toute autre formation. Mais si le moyen déjà soutenu en première instance doit être présenté devant la Cour statuant au fond - le Conseiller ne pouvant confirmer ou infirmer la décision du premier juge - les conclusions qui soulèvent une exception de procédure doivent saisir spécifiquement le Juge de la mise en état par des conclusions d’incident qui lui sont spécialement adressées. Dit autrement, les conclusions au fond qui présenteraient ce moyen, même in limine litis, n’autoriseraient pas une régularisation ultérieure par voie de conclusions d’incident.
Bien plus, la partie qui entend invoquer l’exception de procédure devra aussi prendre les devants puisque la 2ème chambre civile impose de soulever l’exception de procédure avant de conclure au fond. Or, l’exception de procédure consiste souvent en une riposte à une attaque adverse ! Et cet arrêt en est la parfaite illustration. L’appelant qui sait son recours tardif attend systématiquement que l’intimé soulève, ou non, la tardiveté du recours pour opposer l’exception de nullité de forme de la signification. Mais à l’aune de cet arrêt, il n’aura d’autre choix, si la partie adverse n’en a pas pris l’initiative, que de prendre les devants en saisissant, a priori et avant de conclure au fond, le Conseiller de la mise en état pour faire juger nul l’acte de notification ou de signification et recevable son appel. Et il faudra à l’avocat un sacré sens de l’anticipation, pour ne pas dire de la divination, si son client n’a jamais eu connaissance de l’acte de signification, ignorant en toute bonne foi que son appel est tardif. On touche là la limite d’une telle jurisprudence : hasard et procédure civile ne font généralement pas bon ménage.

Romain LAFFLY
Avocat associé
LEXAVOUÉ Lyon

 

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